Les suggestions en hypnose

Définitions de la suggestion

Tenter de définir la suggestion en hypnose, c’est se heurter d’emblée à l’absence de consensus. Selon les écoles, les époques, les praticiens, la suggestion revêt des significations différentes, parfois contradictoires.

Pour Bernheim, pionnier de l’École de Nancy au XIXe siècle, la suggestion était « l’acte par lequel une idée est introduite dans le cerveau et acceptée par lui ». Cette vision, révolutionnaire pour l’époque, plaçait déjà la suggestion au centre du phénomène hypnotique, loin des théories magnétiques de l’époque.

Un siècle plus tard, Milton Erickson bouleverse cette conception en montrant que la suggestion peut être indirecte, métaphorique, et même parfois invisible. Pour lui, elle devient un art de la communication qui permet d’activer les ressources naturelles de la personne sans contrainte ni directive explicite.

Plus récemment, les neurosciences cognitives apportent un éclairage nouveau. Lars-Gunnar Lundh propose de comprendre la suggestion comme un processus d’amorçage (priming) qui active sélectivement certains réseaux de signification dans notre psychisme. Cette perspective nous éloigne de l’idée d’une influence externe pour nous rapprocher d’un mécanisme interne d’organisation de l’expérience.

Une tentative de définition de la suggestion :

Une suggestion hypnotique est une communication qui invite à une réorganisation de l’expérience subjective en activant des structures de signification particulières, permettant l’émergence de nouvelles possibilités perceptuelles, émotionnelles ou comportementales sans contrainte directe. 

La suggestion comme invitation

Contrairement aux idées reçues véhiculées par l’hypnose de spectacle, la suggestion en accompagnement ne fonctionne pas comme un ordre ou une injonction. Elle opère plutôt comme une invitation, une proposition d’expérience qui laisse à la personne la liberté d’accepter ou de décliner.

Si lors de nos séances d’hypnose à Bordeaux, je suggère à une personne « Et tu peux naturellement observer, comment la respiration se pause », je ne force pas le changement. J’ouvre une possibilité, j’évoque une réalité potentielle, et je laisse le psychisme créer ou non cette expérience. Cette nuance est fondamentale car elle préserve l’autonomie de la personne tout en proposant de nouvelles possibilités.

La question qui va alors se poser en séance, est de savoir comment certaines suggestions « prennent » et d’autres non. Ce n’est pas une question de force ou d’autorité de ma part, mais une rencontre ou une résonance entre la suggestion proposée, le niveau d’acceptation (de suggestibilité) et des structures internes de la personne qui la reçoivent.

Une suggestion comme une graine semée sur un terrain fertile

L’art de l’influence invisible

La suggestion fonctionne souvent de façon subtile, parfois même imperceptible. Elle peut se glisser dans une conversation ordinaire, transparaître dans un geste, un regard, une inflexion de voix.

Nous sommes d’ailleurs tous familiers de ce processus. Quand vous regardez un film et que vous vous sentez ému par l’histoire, quand vous lisez un livre et que vous visualisez les scènes décrites, quand vous écoutez une musique qui vous transporte ailleurs : dans tous ces cas, des mots, des images, des sons agissent comme des suggestions.

Votre émotion face au film est réelle, portée par la musique, les acteurs, le rythme et les cadrages. Votre visualisation en lisant est vivante, bien que les personnages n’existent qu’a travers des lettres sur le papier. C’est exactement ce qui se passe avec la suggestion hypnotique : elle utilise cette capacité naturelle de notre esprit à donner vie à ce qui est évoqué.

L’amorçage

Les recherches en psychologie cognitive révèlent que la suggestion s’appuie sur un mécanisme fondamental appelé amorçage (priming).

Ce phénomène montre que l’exposition à certains stimuli peut influencer automatiquement nos perceptions et nos comportements ultérieurs, souvent sans que nous en ayons conscience. A titre d’exemple, voyons comment l’expérience classique de Bargh et ses collègues illustre ce mécanisme. Des participants exposés à des mots évoquant la vieillesse marchaient ensuite plus lentement, sans réaliser le lien entre les mots vus et leur comportement. Cette étude révèle que notre comportement peut être influencé de façon non consciente par des stimuli apparemment anodins.

Les suggestions hypnotiques utilisent ce même mécanisme. Si j’évoque la sécurité, la confiance ou le calme, ces mots agissent préparent le terrain de la rencontre, en activant des idées, des représentations, des sensations qui sont en liens avec ces mots.

Essayer par vous même de prendre quelques secondes pour voir comment certains mots résonnent en vous :

• Guerre
• Crise
• Pandémie
• Conflit
• Haine

A ce stade, si vous vous êtes autorisés à prendre du temps sur chaque mots, possiblement, vous n’êtes pas dans la phase la plus optimiste de votre vie. Et voyez ce qui se passe si vous vous autorisez à prendre quelques seconde pour laisser agir les mots suivants et voir comment ces mots portent en eux, une signification plus profonde :

• Calme
• Confiance
• Amour
• Paix
• Sécurité

Cette seconde série de mots amorcent des choses bien différentes n’est-ce pas !

L’activation des réseaux de signification

Notre cerveau organise l’information selon des réseaux complexes d’associations – ce que les chercheurs appellent des « structures de signification » ou « structures de représentation » (meaning structures). Ces réseaux, formés par notre histoire personnelle, nos apprentissages et nos expériences, déterminent largement la façon dont nous interprétons ce que nous vivons. De façon plus ou moins juste, nous pourrions dire que ces structures de représentation sont la résultante de nos conditionnements, de nos apprentissages et de nos traumatismes, des interprétations et de notre vécu.

Il va alors s’agir quelquefois de voir comment certaines structures peuvent être modifiées lors d’une suggestion.

Prenons un exemple concret : je suis en terrasse avec un ami, quand je vois se diriger un insecte volant dans sa direction. Sa couleur noir et jaune, sa taille, le bruit que fait cet insecte, sont autant d’informations qui vont être interprétées sous le seuil de la conscience.
J’ai le cœur qui bat plus vite, je sens monter une angoisse : c’est un frelon.
Nous voyons ici comment les stimuli amorcent une structure (un ensemble de paramètres) autour de ce qui est perçu puis interprété comme un frelon, et comment dans le même temps se déploient des émotions en lien avec cette structure. Car il faut savoir que je me suis fait piquer à deux reprises récemment par un frelon, et que mon expérience est venue renforcer mon idée que le frelon est dangereux.

Là, je regarde mon ami, il voit que je suis un peu agité. Il se retourne, regarde cet animal et rit. « Il s’agit d’un syrphe géant, c’est totalement inoffensif ». Ces mots, là encore, sont des amorces qui peuvent être vus comme une suggestion. Je vais peut-être l’accueillir puisque je fais confiance à cet ami. Si c’est le cas, cette information va venir changer le modèle de représentation, proposant une nouvelle donnée que je n’avais pas jusqu’ici.
Sa suggestion vient modifier ma structure de représentation. mon émotion et mon interprétation changent. Par ailleurs, cela me permettra de faire un apprentissage qui m’offrira, la prochaine fois que je vois ce type d’insecte, d’avoir un choix (syrphe géant ou frelon).

L’effet d’attente et les prophéties auto-réalisatrices

Un autre mécanisme fondamental de la suggestion repose sur l’effet d’attente. Nos croyances et nos anticipations influencent puissamment notre expérience. Quand nous nous attendons à ressentir quelque chose, notre cerveau se prépare à cette expérience et peut même commencer à la créer avant qu’elle ne se produise.
L’effet placebo constitue l’exemple le plus connu de ce mécanisme. Le simple fait de croire en l’efficacité d’un traitement peut suffire à déclencher une amélioration réelle. Ce n’est pas un effet magique, mais une activation interne de nos systèmes de guérison, nourrie par l’environnement, le contexte, la relation.

En hypnose, la suggestion peut être vue comme un placebo, à certains moments de l’accompagnement. Elle oriente les attentes vers une expérience particulière, et cette orientation peut suffire à la faire émerger. Elle oriente les attentes vers des voix de résolution et cette orientation peut suffire à ouvrir des opportunités de changement, d’évolution.

Cependant, il est notable que plus les suggestions créer de l’attente et plus la déception sera grande en cas de non-réalisation. C’est la raison pour laquelle, si je suis bien convaincu qu’il y a toujours des voix d’amélioration, je m’interdis de vendre du rêve.

Les suggestions directes

Les suggestions directes énoncent clairement ce qui est proposé : « Vos paupières deviennent lourdes », « Vous ressentez une profonde détente ». Elles ont l’avantage de la clarté et peuvent être très efficaces chez les personnes réceptives à ce type d’approche. Leur structure simple et leur message explicite rassurent ceux qui ont besoin de comprendre ce qui leur arrive.
Cependant, elles risquent aussi de déclencher des résistances chez ceux qui ont besoin de garder un sentiment de contrôle ou qui se méfient des tentatives d’influence trop manifestes. L’esprit critique peut alors s’activer et bloquer l’effet recherché.

changez ! maintenant !

Les suggestions indirectes

Les suggestions indirectes, popularisées par Erickson, proposent l’expérience de façon plus subtile : « Vous pourriez commencer à remarquer que votre respiration trouve naturellement son rythme », « Il est possible que certaines parties de votre corps découvrent leur propre façon de se détendre ». Cette approche respecte davantage l’autonomie de la personne et contourne souvent les résistances conscientes.
L’art de la suggestion indirecte réside dans sa capacité à faire naître une expérience sans jamais l’imposer. Elle utilise des formulations conditionnelles, des questions ouvertes, des métaphores qui laissent aux processus inconscients le soin de créer leur propres réponses.

Les suggestions non verbales

La suggestion ne se limite pas au langage verbal. Nos gestes, notre posture, notre rythme respiratoire, le ton de notre voix constituent autant de canaux par lesquels nous émettons et recevons des suggestions constamment.
Le fait de ralentir progressivement son débit de parole en séance suggère implicitement une détente. Une respiration plus profonde invite à une synchronisation respiratoire. Un regard bienveillant évoque la sécurité. Ces éléments non verbaux agissent souvent de façon plus puissante que les mots eux-mêmes, car ils s’adressent directement aux mécanismes automatiques de notre système nerveux. Selon la théorie polyvagale, ces signaux sont perçus comme des indices de sécurité, activant le nerf vague pour favoriser un état de calme et d’ouverture, propice aux changements hypnotiques.
Les suggestions non verbales peuvent être particulièrement puissantes. Un sourire authentique, une posture détendue, un rythme respiratoire apaisé constituent autant de messages subliminaux qui influencent favorablement l’état de la personne.

Les suggestions post-hypnotiques

Certaines suggestions visent à créer des effets qui persistent au-delà de la séance. Ces suggestions post-hypnotiques peuvent ancrer de nouveaux comportements, de nouvelles réponses émotionnelles, ou modifier durablement la façon dont une personne perçoit certaines situations.
« Chaque fois que vous vous trouvez dans cette situation, vous pourrez vous rappeler de cette séance et remarquez comment elle continue d’agir en vous dans les semaines qui suivent  » : ce type de suggestion crée un lien entre un contexte spécifique et une réponse désirée. Elle fonctionne en programmant une nouvelle association dans les réseaux de signification de la personne.
L’efficacité de ces suggestions dépend largement de leur cohérence avec les valeurs et les aspirations profondes de la personne. Elles ne peuvent pas créer artificiellement des changements qui iraient à l’encontre de sa nature profonde, mais elles peuvent révéler et faciliter l’expression de potentialités déjà présentes.
Les suggestions post-hypnotiques illustrent parfaitement comment un travail en séance peut se prolonger dans la vie quotidienne. Elles transforment l’hypnose d’une expérience ponctuelle en un processus de changement durable.

L’auto-suggestion

Dans cette même logique, nous nous administrons constamment des suggestions à nous-mêmes, le plus souvent sans nous en rendre compte. Nos dialogues internes, nos anticipations, nos visualisations mentales constituent autant de suggestions que nous nous adressons.
Cette auto-suggestion permanente peut jouer en notre faveur ou… en notre défaveur. Prendre conscience de ces mécanismes permet de les utiliser plus consciemment et de réorienter certaines pensés, certains mots de façon plus favorable.

Quand vous vous répétez « je ne veux pas stresser face à cette situation» en boucle, vous vous administrez une suggestion de stress qui peut effectivement amplifier cette sensation. À l’inverse, vous pouvez apprendre à vous dire « je désire rester calme face à cette situation » et constater que cette formulation modifie réellement votre état interne.

Lors des séances d’hypnose en cabinet à Bordeaux, il est toujours notable qu’une suggestion ne devient véritablement intéressante qu’a partir du moment ou elle est reçue. S’il y a bien une personne qui suggère, il y a de la même manière une personne qui reçoit. Dès lors la question de la suggestivité se pose : « quels est le meilleurs moment pour proposer une suggestion ? »

Nous ne sommes pas tous égaux face aux suggestions

La réceptivité aux suggestions varie considérablement d’une personne à l’autre et, chez une même personne, d’un moment à l’autre. Cette variabilité dépend de nombreux facteurs : personnalité, état du moment, relation avec le praticien, type de suggestion utilisée.

Les recherches distinguent généralement deux grandes orientations de la suggestibilité.

La suggestibilité externe concerne la réceptivité aux suggestions provenant de l’environnement : paroles du thérapeute, éléments du contexte, confirmations de ce qui est perçu. Les personnes fonctionnant sur ce mode sont généralement sensibles aux suggestions directes et aux validations de leur expérience immédiate.
La suggestibilité interne implique la réceptivité aux contenus mentaux internes : imagination, souvenirs, sensations corporelles subtiles. Ce mode favorise les processus imaginatifs et les suggestions métaphoriques. Ces personnes préfèrent souvent les approches indirectes qui font appel à leur créativité inconsciente.

Ces notions sont importantes à prendre en considération dans l’accompagnement. A certains moments, ces distinctions sont même essentielles quand à l’issue de certaines séances.

La suggestibilité comme une porte qui s’ouvre

La suggestibilité au quotidien, au-delà de l’hypnose

Il est important de comprendre que la suggestibilité ne se limite pas au cadre hypnotique. Elle s’exprime constamment dans notre vie quotidienne : notre réceptivité aux ambiances, aux publicités, aux influences sociales, aux émotions d’autrui. Nous sommes tous, à des degrés divers, influençables par notre environnement.

Cette suggestibilité quotidienne peut jouer en notre faveur ou contre nous. Une personne très suggestible peut facilement « attraper » les émotions positives de son entourage, se laisser porter par une ambiance joyeuse, être touchée par une belle histoire. Mais elle peut aussi être plus vulnérable aux manipulations, aux pressions sociales, aux atmosphères négatives.

Notre suggestibilité varie selon notre état de fatigue, notre niveau de stress, notre degré de confiance, notre humeur du moment, et du contexte en général, elle est en perpétuel mouvement.

Les facteurs qui modulent la suggestibilité

Plusieurs éléments peuvent favoriser ou diminuer notre réceptivité aux suggestions à un moment donné.

• La confiance dans la source de la suggestion joue un rôle fondamental : plus nous accordons de crédibilité à quelqu’un, plus nous sommes susceptibles d’accueillir ses propositions.
• L’état physiologique influence également la suggestibilité. La fatigue peut parfois diminuer nos défenses critiques et nous rendre plus réceptifs. Certains états émotionnels – la peur, l’amour, l’enthousiasme – modifient temporairement notre seuil de réceptivité.
• Le contexte social joue également un rôle important. Nous sommes généralement plus suggestibles en groupe qu’individuellement, surtout si nous cherchons à nous conformer aux attentes du groupe.
• L’autorité perçue de la personne qui émet la suggestion influence fortement notre réceptivité.
• Les croyances personnelles modulent également la suggestibilité. Quelqu’un qui croit fermement que « personne ne peut l’influencer » peut effectivement développer une résistance importante. À l’inverse, une personne convaincue de sa réceptivité peut devenir effectivement plus suggestible.

Hypnose classique : la suggestion dans la transe

Dans l’hypnose classique, les suggestions jouent deux rôles distincts. D’abord, elles servent à induire un état de transe : « Vos paupières s’alourdissent », « Votre respiration devient naturellement plus profonde », « Chaque expiration vous emmène plus loin dans la détente ». Ces suggestions d’induction s’appuient sur un cadre ritualisé – fixation du regard, relaxation progressive, comptages descendants – pour amplifier la réceptivité.
Une fois l’état hypnotique établi, les suggestions thérapeutiques prennent le relais pour guider le changement souhaité : « Vous vous sentez confiant face à cette situation », « Cette cigarette vous semble fade et sans intérêt », « Votre corps sait exactement comment guérir ». Ces suggestions de changement bénéficient de la réceptivité accrue créée par l’état de transe.

Hypnose conversationnelle : la suggestion invisible

Inspirée par Erickson et Nardone, l’hypnose conversationnelle intègre les suggestions dans un dialogue naturel, sans transe formelle. Un regard confiant, une pause bien placée ou une question comme « Qu’est-ce que ça ferait de vous sentir léger face à ce défi ? » peuvent amorcer un changement. L’hypnose conversationnelle illustre comment les suggestions peuvent opérer de façon subtile, intégrées dans une conversation apparemment ordinaire. Cette approche utilise les mécanismes de suggestion sans recourir aux rituels classiques d’induction : pas de fermeture des yeux, pas de relaxation formelle, pas de « vous allez entrer en transe ». L’efficacité ne dépend plus de la profondeur de la transe mais de la qualité de la communication et de la justesse des interventions.

Suggestions quotidiennes : une hypnose spontanée

Dans notre communication quotidienne, nous émettons constamment des suggestions sans nous en rendre compte. Nos mots, notre ton, nos expressions faciales influencent l’état d’esprit de nos interlocuteurs. Un sourire suggère la bienveillance, une voix calme évoque la sérénité, un regard confiant inspire l’assurance.
Cette dimension naturelle de la communication explique pourquoi certaines personnes ont un effet apaisant sur leur entourage tandis que d’autres génèrent de l’anxiété. Nous sommes tous, à notre niveau, des « hypnotiseurs » informels qui influençons et sommes influencés en permanence.
Prendre conscience de cette réalité peut transformer notre façon d’être en relation. Plutôt que de subir ces influences, nous pouvons apprendre à les utiliser consciemment et bienveillamment, tant pour notre propre bien-être que pour celui des personnes qui nous entourent.

Lorsqu’on comprend vraiment ce qu’est une suggestion — pas seulement comme outil, mais comme force de transformation implicite — on ne peut plus l’utiliser à la légère. La suggestion, même subtile, même involontaire, oriente. Elle influence la manière dont une personne se perçoit, ressent, anticipe. Dès lors, elle appelle une éthique. Une éthique de la transparence, de la vigilance, de la responsabilité. Plutôt que de multiplier les procédés suggestifs ou les stratégies d’influence implicite, je préfère une approche psychoéducationnelle : partager avec la personne les mécanismes à l’œuvre, l’aider à reconnaître ce qui se joue, nommer les effets pour qu’elle puisse en devenir sujet. C’est peut-être moins spectaculaire, mais c’est infiniment plus respectueux. Savoir suggérer, c’est savoir quand il est juste de ne pas le faire.

La suggestion hypnotique, par sa subtilité et sa puissance, soulève souvent des interrogations. Voici les questions les plus fréquentes que je rencontre en cabinet à Bordeaux, pour vous aider à mieux comprendre ce processus.

Automatisme du comportement social : Effets directs de l’activation de traits et de stéréotypes sur l’action
Cette étude pionnière montre que l’exposition à des mots liés à la vieillesse ralentit inconsciemment la marche, établissant l’amorçage sémantique comme base des suggestions hypnotiques influençant les comportements sans prise de conscience. Bargh, J. A. – 1996 – « Automaticity of social behavior: Direct effects of trait construct and stereotype-activation on action » – (voir)

Relation entre perception et comportement, ou comment gagner à Trivial Pursuit
Cette recherche démontre que l’activation de stéréotypes améliore les performances cognitives, validant l’influence des perceptions sur le comportement, un mécanisme pertinent pour les suggestions hypnotiques via les réseaux de signification – Dijksterhuis, A. – 1998 – « The relation between perception and behavior, or how to win a game of trivial pursuit »  (voir)

La suggestion hypnotique réduit les conflits dans le cerveau humain
Utilisant l’imagerie cérébrale, cette étude révèle que les suggestions hypnotiques diminuent l’activité dans le cortex cingulaire antérieur, réduisant les conflits cognitifs et renforçant leur efficacité thérapeutique. Raz, A. – 200 – « Hypnotic suggestion reduces conflict in the human brain »  (voir)

La suggestion hypnotique : Opportunités pour la neuroscience cognitive
Cette revue explore les bases neurobiologiques des suggestions hypnotiques, montrant leur impact sur des régions comme le cortex préfrontal, offrant de nouvelles perspectives pour la recherche en neurosciences cognitives. Oakley, D. A. – 2013 – « Hypnotic suggestion: opportunities for cognitive neuroscience » (voir)

Hypnose et régulation descendante de la conscience
Cette analyse examine les mécanismes de contrôle attentionnel et de régulation descendante dans l’hypnose, montrant comment les suggestions influencent la conscience, un aspect clé des approches hypnotiques modernes. Terhune, D. B. – 2017 – « Hypnosis and top-down regulation of consciousness » (voir)

Ouverture aux expériences absorbantes et auto-modificatrices, un trait lié à la susceptibilité hypnotique
Cette étude développe l’absorption comme trait de personnalité influençant la suggestibilité hypnotique, expliquant les variations individuelles dans la réceptivité aux suggestions. Tellegen, A. – 1974 – « Openness to absorbing and self-altering experiences (« absorption »), a trait related to hypnotic susceptibility » (voir)

L’état modifié de l’hypnose : Évolutions dans le paysage théorique
Cette recherche remet en question l’idée d’un état altéré unique en hypnose, soutenant que la suggestibilité dépend du contexte et des approches conversationnelles, offrant une vision flexible. Kirsch, I. – 1995 – « The altered state of hypnosis: Changes in the theoretical landscape » (voir)

Échelle de susceptibilité hypnotique de groupe de Harvard
Cet outil standardisé mesure la réceptivité aux suggestions hypnotiques, restant une référence pour évaluer les différences individuelles dans la recherche hypnotique. Shor, R. E. – 1962 – « Harvard Group Scale of Hypnotic Susceptibilit »y – Source: Consulting Psychologists Press

Analyse cognitivo-comportementale de la suggestion hypnotique
Cette analyse explore les mécanismes cognitifs des suggestions hypnotiques, introduisant les structures de signification activées par l’amorçage, essentielles pour réorganiser l’expérience subjective. Lundh, L. G. – 1999 – « Cognitive-behavioral analysis of hypnotic suggestion » – Source: Clinical hypnosis and self-regulation: Cognitive-behavioral perspectives

L’illusion visuelle hypnotique modifie le traitement des couleurs dans le cerveau
Cette étude démontre que les suggestions hypnotiques altèrent l’activité cérébrale dans les aires visuelles, confirmant leur impact sur les structures de représentation mentale. Kosslyn, S. M. – 2000 – « Hypnotic visual illusion alters color processing in the brain » (voir)